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Accueil » IRM 7 Tesla et maladies psychiatriques
L’IRM 7T va participer au décodage neurofonctionnel et à l’analyse fine des pathologies mentales, qui sont un enjeu majeur de santé publique. En effet, à l’horizon 2040, les pathologies mentales constitueront la principale cause de morbidité dans le monde, loin devant les causes cardio-vasculaires… L’intérêt clinique de l’IRM 7 réside dans une meilleure compréhension des mécanismes neurophysiologiques impliqués dans les pathologies psychiatriques, ce qui permettra d’améliorer la précision des diagnostics psychiatriques, pour mieux accompagner et mieux traiter les patients. Mais aussi et si possible, de mieux prévenir l’apparition des troubles mentaux sévères comme la schizophrénie, les troubles bipolaires ou les troubles anxio dépressifs, qui entravent considérablement la qualité de vie des personnes concernées.
Les explications du Pr Pierre Fourneret, Chef du service de psychopathologie du développement de l’enfant et de l’adolescent – Hôpital Femme Mère Enfant
« En tant qu’outil d’investigation, l’IRM 7T ouvre de belles perspectives puisqu’elle permet d’envisager de mieux comprendre les processus neurophysiologiques sous-jacents aux principales pathologies mentales. C’est une façon de créer une fenêtre de lecture des troubles mentaux, comme si on ouvrait la boîte crânienne, pour comprendre ce qui se passe dans le fonctionnement cérébral d’une personne souffrant de dépression par exemple, ou d’un enfant présentant un trouble autistique.
Aujourd’hui, dans la prise en charge des maladies psychiatriques, l’imagerie cérébrale est utilisée uniquement pour éliminer des processus neurologiques, notamment des tumeurs qui peuvent s’exprimer parfois par des troubles du comportement et/ou de l’humeur. On n’y a pas recours de façon systématique car on n’a pas encore mis en évidence de signature spécifique des maladies mentales qui nous permettrait de valider « à coup sûr » un diagnostic de trouble psychiatrique, ou de préciser un risque de développer tel ou tel trouble. Autrement dit, on n’a pas identifié de biomarqueur suffisamment précis et associé aux principaux troubles psychiatriques, mais c’est l’un des objectifs de la recherche en santé mentale.
On sait aujourd’hui que nos pensées, nos émotions ou plus globalement nos actions mobilisent des réseaux neuronaux et sont le résultat de mécanismes chimiques complexes. Jusqu’à l’arrivée de l’imagerie cérébrale, on ne pouvait pas explorer ces mécanismes. Avec l’IRM 7T, c’est comme si on avait un microscope qui nous permettait de voir et d’étudier ce qui se joue dans le cerveau « en-dessous » de la pensée et des comportements.
Grace à l’IRM, on peut mesurer et étudier les zones d’activités neuronales dans l’espace (leur localisation) mais aussi dans le temps (dynamique temporelle) en fonction de stimulations précises. Les images d’IRM permettent de voir les perturbations de l’activité des neurones dans certaines régions du cerveau impliquées dans des processus tels que le raisonnement, la régulation émotionnelle, l’attention ou la concentration, ou encore de mesurer la capacité de certaines régions à interagir les unes avec les autres.
Un des principaux enjeux est de bien décoder ces images, pour arriver à différencier les différentes perturbations associées à tel ou tel trouble psychiatrique, et qui peuvent concerner les mêmes régions du cerveau. Par exemple, on peut avoir une perturbation de l’activité des régions frontales du cerveau aussi bien dans la dépression, la schizophrénie ou les troubles obsessionnels compulsifs (TOC).
Avec l’IRM 7T, nous aurons accès des images bien plus fines qu’avec les IRM actuelles. C’est comme si on améliorait le grain (la précision et la netteté) d’une photo assez floue pour avoir accès à l’arrière-plan. On espère donc pouvoir identifier la « signature » propre aux différentes pathologies psychiatriques pour mieux les distinguer les unes des autres. Ce qui constitue un vrai défi en terme diagnostic.
L’IRM 7 Tesla va également permettre une exploration beaucoup plus fine des mécanismes biochimiques qui peuvent être impliqués dans un trouble psychiatrique. Ce qui devrait nous permettre d’individualiser des marqueurs de vulnérabilité qui pourraient exposer une personne à développer tel ou tel type de pathologie mentale.
On sait que certains facteurs environnementaux traumatiques, qui vont bouleverser les personnes, peuvent aussi avoir des impacts en termes de fonctionnement mental et de fonctionnement neuropsychologique. Par exemple, la tristesse ou les ruminations classiquement associées à la dépression post traumatique sont également fortement corrélées avec un dysfonctionnement du cortex frontal et de certaines régions sous corticales (amygdale et hippocampe). La haute résolution des images offertes par l’IRM 7T, va nous permettre de mesurer beaucoup plus finement l’impact des événements traumatiques sur ces régions cérébrales. Mais aussi, l’impact sur ces régions des différentes mesures d’accompagnement thérapeutique proposées, que cela soit un traitement psychotrope ou une psychothérapie. Avec ici l’enjeu de la mesure d’efficacité de ces techniques.
Pour terminer, plus on comprend les mécanismes qui enclenchent un trouble mental, plus on peut espérer à terme disposer de leviers d’actions précoces – préventifs et thérapeutiques – qui pourront, si ce n’est empêcher le développement du trouble (car se joue aussi en santé mentale le poids des facteurs de vie traumatiques et/ou environnementaux), tout au moins en limiter les impacts sur la trajectoire de vie des personnes concernées ou potentiellement prédisposées par des facteurs de vulnérabilité. Le défi clinique et scientifique est de pouvoir disposer d’indicateurs neurophysiologiques fiables et suffisamment précis des troubles psychiatriques et neurodéveloppementaux pour espérer être au plus proche du diagnostic et des traitements efficaces à proposer, aux adultes comme aux enfants et adolescents. C’est là tout l’enjeu de la médecine dite de « précision et personnalisée » dans laquelle doit s’inscrire la psychiatrie, comme toutes les autres spécialités médicales.
Mieux comprendre, pour mieux accompagner, mieux traiter, voire mieux prévenir tels sont les objectifs de l’IRM 7T. »