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Les proches aidants, c’est-à-dire un membre de la famille, un ami ou un voisin par exemple, jouent un rôle majeur dans le dispositif de prise en soin à domicile des patients en situation de perte d’autonomie liée à la maladie d’Alzheimer (MA). Leur aide, informelle et bénévole (par opposition à l’accompagnement qui serait apporté par des professionnels), se traduit principalement par une assistance dans les activités de la vie quotidienne comme se laver, aller aux toilettes, s’alimenter, ou préparer les repas, faire les courses ou le ménage. Il peut s’agir aussi pour les proches aidants d’accompagner à un rendez-vous, ou simplement de passer du temps avec la personne atteinte de la maladie d’Alzheimer.
Une étude réalisée en 2008 a permis de quantifier et de valoriser la contribution des aidants : elle a été estimée à 14 milliards d’euros, soit 40 à 50 % du coût total de la maladie d’Alzheimer en France !
Autrement dit :
– la moitié de la prise en charge de la maladie d’Alzheimer est absorbée par les aidants !
– si les tâches réalisées par les aidants devaient être assurées par des professionnels, notre système de santé devrait absorber 14 milliards d’euros chaque année…
Les aidants représentent donc un poids économique considérable.
Le Dr Frédéric Gervais, pharmacien au Centre d’Investigation Clinique « Vieillissement, Cerveau, Fragilité » des HCL, explique :
« Parce que l’engagement des aidants auprès de leur proche repose sur le volontariat, il n’est pas raisonnable de considérer cette aide informelle comme acquise et pérenne.
Avec le vieillissement de la population, de plus en plus de personnes vont être atteintes de maladie d’Alzheimer. Dans le même temps, les modes de vie et les structures familiales évoluent, et on constate une diminution de l’aide apportée par chacun au sein de sa famille. Dans ce contexte, nous nous interrogeons sur la position des aidants, leur rôle, leur devenir… »
Il existe très peu d’études sur l’aide informelle à ce jour, et celles qui ont été menées remontent à plusieurs dizaines d’années. Ainsi, on ne dispose pas d’une vision récente et précise des contours de cette aide informelle, alors que les enjeux sont majeurs.
Comment maintenir dans le temps ce pilier de la prise en soin ? Comment faire en sorte que cet accompagnement « non professionnel » apporte une aide de qualité, qui soit à la fois :
– utile et véritablement efficace pour les malades,
– satisfaisante pour les aidants (en considérant le rapport entre leur investissement et leur ressenti des bienfaits sur leur proche) tout en les préservant de l’épuisement psychique et physique.
Une étude qui s’intéresse aux aidants dans la maladie d’Alzheimer
Au sein du Centre Mémoire Ressources Recherche (CM2R) des HCL, une équipe coordonnée par le Dr Frédéric Gervais, pharmacien chercheur au sein du Centre de Recherche Clinique « Vieillissement, Cerveau, Fragilité » (CRC VCF), souhaite mener le projet ICAD (Informal Care in Alzheimer Disease), qui vise à évaluer l’aide informelle apportée par les aidants aux différents stades de la maladie d’Alzheimer.
Il s’agit de comprendre les mécanismes du recours à cette aide informelle, autrement dit, si et comment l’aide apportée par les aidants varie en fonction :
– d’une part, de l’avancée de la maladie, du déclin cognitif, de la perte d’autonomie, de la présence de comorbidités (i.e. de maladies associées : combien ? lesquelles ?), des troubles du comportement,
– d’autre part, du « fardeau de l’aidant », c’est-à-dire des conséquences de la relation d’aide sur le ressenti de l’aidant, sa santé psychique (voire physique) et sa perception du soutien social qu’il reçoit : quelle typologie d’aidant va être le plus impliqué ? comment il vit cette situation d’aidant ? quelles corrélations avec l’aide qu’il va pouvoir procurer à son proche malade ? etc.
L’étude ICAD sera menée auprès de patients reçus en consultation mémoire à l’Hôpital des Charpennes (Centre Mémoire Ressources Recherche des HCL) accompagnés d’un aidant, soit environ 312 binômes patients/aidants sur 12 mois. Au cours de la consultation, des données cliniques sur le patient seront collectées, et en parallèle, l’aidant s’entretiendra avec un psychologue investigateur.
Il s’agira de recueillir des informations de différentes natures :
– le type d’aide concrète apportée au malade, par exemple au cours du dernier mois : courses, toilette, accompagnement chez le médecin, hébergement à domicile, etc.
– les caractéristiques de l’aidant : sexe, lien avec le malade, activité professionnelle…
– la perception éventuelle d’aides financières par les aidants.
L’étude ICAD consiste donc à faire un état des lieux de l’aide informelle, apportée par les aidants, dans la maladie d’Alzheimer.
Pour l’équipe du CM2R, cet état des lieux constituera un point de départ, puisque les données recueillies permettront d’aller encore plus loin et d’ouvrir des perspectives.
Plusieurs pistes se dessinent en particulier, avec, en premier lieu, l’analyse de l’impact économique de l’arrivée potentielle des nouveaux traitements contre la maladie d’Alzheimer sur notre système de santé en intégrant la notion d’aide informelle.
Le Dr Frédéric Gervais explique :
« L’arrivée de nouveaux traitements contre la maladie d’Alzheimer devrait permettre de ralentir le déclin cognitif des malades mais ils restent d’une efficacité modeste puisqu’ils ne permettront pas de guérir pour l’instant la maladie d’Alzheimer. En revanche, si ces traitements permettent de maintenir plus longtemps ces patients à un stade léger de la maladie, l’aide informelle apportée par les aidants pourrait être également moins importante, plus durable, plus qualitative pour les patients et plus épanouissante pour leurs aidants. Nous pourrions donc espérer un transfert moins important de l’aide informelle sur l’aide professionnelle financée par notre système de santé. Il y a donc un véritable enjeu à comprendre comment ces médicaments pourraient avoir un impact sur l’aide informelle et sur les coûts de santé associés. Cela pourrait modérer l’impact économique que représenterait l’introduction de ces traitements sur le territoire national. »
D’autres perspectives se profilent grâce aux données recueillies dans le cadre du projet ICAD, telles que :
– Etudier la corrélation entre l’aide informelle apportée par les aidants et le versement d’aides financières : qui perçoit l’allocation journalière du proche aidant – AJPA ? pendant combien de temps ? quelles corrélations avec les différents stades de MA ? avec quel impact sur la situation professionnelle et/ou économique de l’aidant ? etc.
Objectif : connaître la réalité des aides accordées, partager les données avec les collectivités et l’Etat, établir des recommandations pour faire évoluer le dispositif afin que le rôle d’aidant dans la MA soit plus supportable, avec un impact moindre sur qualité de vie de l’aidant.
– Anticiper les situations complexes dans la relation malade/aidant : les données recueillies dans le cadre du projet ICAD apporteront des clés pour permettre aux soignants de repérer différents facteurs de risques ; ainsi, face à une relation aidant/aidé précaire, l’équipe soignante pourra mettre en place, dès le début de la prise en charge, un accompagnement du malade par des professionnels, voire un accompagnement de l’aidant lui-même pour anticiper des difficultés à venir.
– Evaluer l’impact sur le ressenti des aidants de les intégrer dans une réflexion sur leur rôle, la satisfaction ou au contraire l’épuisement liés à leur investissement auprès de leur proche, l’incidence sur leur situation professionnelle ou leur qualité de vie…
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Dr Frédéric Gervais, pharmacien chercheur au sein du Centre de Recherche Clinique « Vieillissement, Cerveau, Fragilité » des HCL
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