« Maman a encore oublié où elle rangeait ses clés. Et ce soir, elle ne m’a pas reconnu… » Être aidant Alzheimer, c’est vivre chaque jour avec la maladie d’un proche qui s’efface peu à peu. Entre charge mentale, fatigue et isolement, comment tenir sur la durée ? Existe-t-il des solutions pour alléger ce quotidien ? Explorons les réalités du rôle d’aidant, les défis rencontrés et les ressources concrètes pour mieux accompagner un proche tout en se préservant.

Quels sont les défis quotidiens de l’aidant Alzheimer ?

L’aidant naturel est un proche non professionnel qui accompagne régulièrement une personne dépendante dans sa vie quotidienne.

Impacts sur la vie personnelle et professionnelle

Les aidants de personnes atteintes d’Alzheimer jonglent chaque jour entre les soins (aider à manger, se lever, se laver) et la gestion des comportements difficiles (agitation, errance, agressivité). La coordination des rendez-vous médicaux et des intervenants s’ajoute à la charge matérielle et logistique, au détriment des loisirs et projets personnels.

Ces actions élémentaires, mais incessantes, mobilisent souvent une énergie considérable. 70 % des conjoints et 50 % des enfants consacrent plus de 6 heures par jour à leur proche, au point que le temps libre se raréfie considérablement.

D’autre part, concilier ce rôle avec une activité professionnelle devient un vrai casse-tête. 24 % doivent réaménager leurs horaires, certains réduisent leur activité, voire renoncent à leur emploi.

Charge émotionnelle et répercussions sur la santé des aidants

L’aidant Alzheimer porte une charge émotionnelle souvent écrasante, connue sous le nom de caregiver burden. Ce fardeau invisible mêle fatigue mentale, sentiment d’impuissance, culpabilité et tristesse face au déclin progressif de la personne aidée.

Beaucoup vivent un deuil anticipé, marqué par la perte du lien tel qu’il existait autrefois. L’isolement aggrave ce mal-être, d’autant plus que les aidants ont parfois tendance à délaisser leurs propres besoins.

Selon la Haute Autorité de Santé (HAS), cette pression prolongée augmente les risques de dépression, de troubles du sommeil, d’anxiété, mais aussi d’hypertension, de troubles musculo-squelettiques et de pathologies cardiovasculaires.

Où trouver du soutien en tant qu’aidant Alzheimer ?

Être aidant Alzheimer, c’est souvent avancer seul. Sans soutien, l’aidant risque l’épuisement et la personne malade peut souffrir d’un accompagnement inadapté. Heureusement, des lieux et services existent pour ne pas rester isolé face aux difficultés.

Alzheimer : aide aux familles et dispositifs de répit

Quand on est aidant Alzheimer, s’accorder du répit n’est pas un confort, c’est un besoin vital. Plusieurs formules permettent de recharger ses batteries, en confiant temporairement certaines tâches à des structures adaptées :
des places d’accueil de jour ou de nuit ;
un hébergement temporaire ou en maison de répit ;
un relai à domicile (baluchonnage, aide la nuit…) ;
des séjours adaptés pendant les vacances.

Pour trouver la solution la plus adaptée, les aidants peuvent s’adresser aux CLIC (Centre Local d’Information et de Coordination), aux CCAS (Centre Communal d’Action Sociale), à la MDPH (Maison Départementale pour les Personnes Handicapées) ou aux plateformes d’accompagnement et de répit (PFR).

Accompagnement psychologique et moral des aidants Alzheimer

Quand on accompagne un proche atteint d’Alzheimer, il est essentiel de ne pas rester seul·e face à l’épuisement moral. De nombreuses associations proposent des espaces d’échange et de soutien. Les groupes de parole et les cafés des aidants permettent de rencontrer d’autres personnes vivant des situations similaires, dans un cadre bienveillant.

Il existe aussi des plateformes d’écoute anonymes, tenues par des professionnels formés, pour libérer la parole sans jugement. En cas de besoin, un numéro unique est à votre disposition : le 0 800 360 360. Ce service vous met en lien avec des communautés 360, qui coordonnent les aides disponibles localement.

Enfin, certaines consultations médicales sont spécifiquement pensées pour les aidants. Elles offrent un temps d’écoute, de conseils et un accompagnement thérapeutique.

Se former et s’informer sur la maladie d’Alzheimer pour mieux accompagner un proche

Être aidant demande des compétences spécifiques, souvent acquises sur le tas, au fil des difficultés. Pour accompagner plus sereinement un proche atteint d’Alzheimer, il est possible de suivre des ateliers de sensibilisation ou de formation, proposés gratuitement aux aidants.

Ces temps d’échange permettent de mieux comprendre la maladie, d’apprendre certaines techniques, de connaître les solutions de répit, mais aussi de prendre soin de soi et de reconnaître ses propres limites.

Animés par des professionnels (psychologues, ergothérapeutes, pairs aidants…), ces ateliers peuvent être ponctuels ou s’inscrire dans un parcours sur plusieurs jours. Ils aident aussi à sortir de la culpabilité et à renforcer la relation aidant-aidé.

Pour trouver une formation près de chez vous, consultez le portail national d’information de la CNSA, les plateformes de répit (PFR), les CLIC, les CCAS ou les associations d’aidants.

Droits et aides financières pour Alzheimer

Ces aides permettent de couvrir une partie des frais liés à l’accompagnement. En facilitant l’accès à ces soutiens, elles réduisent la pression sur l’aidant, limitent les risques d’épuisement et contribuent à un meilleur accompagnement de la personne malade.

Aides financières pour les personnes Alzheimer et leurs proches aidants

Pour la personne malade, l’Allocation personnalisée d’autonomie (APA) permet de financer des aides à domicile, du matériel adapté, voire un accueil de jour. Elle s’adresse aux personnes de plus de 60 ans en perte d’autonomie. Avant cet âge, c’est la Prestation de compensation du handicap (PCH) qui peut être sollicitée, via la MDPH.

Les dépenses engagées pour des services à domicile peuvent ouvrir droit à un crédit d’impôt de 50 %, qu’il s’agisse d’aide à la toilette, de ménage ou de repas livrés. Certaines aides, comme l’APA ou la PCH, permettent aussi de financer des solutions de répit. Ces dispositifs sont complémentaires, souvent cumulables, et méritent d’être explorés avec l’aide des services sociaux ou des associations spécialisées.

Congés et aménagements pour les aidants naturels actifs

Le congé de proche aidant, d’une durée maximale de trois mois renouvelables (jusqu’à un an sur l’ensemble de la carrière), permet de se rendre pleinement disponible pour un proche en perte d’autonomie. Il n’est pas rémunéré par l’employeur, mais peut être indemnisé par l’État via l’AJPA, versée durant 66 jours (et jusqu’à 264 jours depuis 2025 si plusieurs proches sont concernés).

Quand l’arrêt complet n’est pas possible, il existe des solutions plus souples : temps partiel choisi, aménagement d’horaires, ou télétravail si les missions le permettent. Ces ajustements doivent être discutés avec l’employeur, qui n’a pas d’obligation légale mais peut les accepter au titre de la qualité de vie au travail ou de la responsabilité sociétale. Certaines conventions collectives ou accords d’entreprise prévoient d’ailleurs des jours d’absence rémunérés ou supplémentaires pour aider un proche malade.

Si la situation devient trop lourde à gérer, un congé sabbatique, un congé sans solde, voire une rupture conventionnelle peuvent être envisagés. En cas de difficulté, le médecin du travail ou un assistant social peut aider à faire le point sur les dispositifs existants et accompagner les démarches.

Anticiper l’évolution de la maladie d’Alzheimer et s’organiser

Chaque stade de la maladie demande une posture différente. Au début, il est important de respecter l’autonomie de la personne, tout en instaurant une routine rassurante. Quand la maladie progresse, l’aidant doit aussi apprendre à gérer les troubles du comportement sans confrontation, en adoptant une attitude calme et en identifiant les sources de stress.

Établir un projet de vie pour préserver l’autonomie décisionnelle

Un projet de vie est un document construit autour des besoins, des souhaits et des habitudes de la personne malade. Il permet d’anticiper et de guider les choix tout au long de l’évolution de la maladie.

Ce projet peut être complété par des directives anticipées (volontées médicales pour la fin de vie). Il se construit avec la personne tant que c’est possible, puis avec ses proches et les professionnels. Il peut être mis à jour à tout moment.

Il favorise la cohérence et la continuité des soins, en évitant les décisions prises dans l’urgence ou la culpabilité. C’est aussi un outil de dialogue, pour mieux coordonner les interventions, notamment en cas d’entrée en établissement ou d’hospitalisation.

Démarches juridiques à planifier

Ces démarches, souvent sensibles, méritent d’être abordées tôt, dans un cadre serein et bienveillant. Il est notamment conseillé de rédiger un mandat de protection future, qui permet de désigner à l’avance un proche de confiance pour gérer ses affaires personnelles et patrimoniales le jour où cela ne sera plus possible.

La personne peut aussi mettre à jour son testament pour organiser sa succession, ou établir une procuration bancaire afin de déléguer certaines démarches dès maintenant. Si ces dispositifs n’ont pas été mis en place à temps, une mesure de curatelle ou tutelle pourra être demandée auprès du juge.

Adapter le logement de la personne à ses troubles

Adapter le logement d’une personne atteinte d’Alzheimer permet de sécuriser son quotidien tout en maintenant son autonomie le plus longtemps possible. Il s’agit de simplifier l’environnement, de renforcer les repères visuels (étiquettes, pictogrammes, couleurs contrastées) et d’éviter les obstacles inutiles.

Lorsque la désorientation s’accentue, il peut être utile de limiter les risques de fugue avec une alarme de porte ou une serrure sécurisée. Un ergothérapeute peut accompagner cette mise en place, et des aides financières (APA, PCH, crédit d’impôt) existent pour en alléger le coût.

Être aidant Alzheimer, c’est un engagement fort, mais souvent éprouvant. N’attendez pas d’être à bout pour demander de l’aide. Informez-vous, entourez-vous, et faites valoir vos droits. Et surtout, n’oubliez pas : prendre soin de vous, c’est aussi prendre soin de votre proche.

Découvrez l’étude ICAD, menée par la fondation HCL pour mieux comprendre le rôle des aidants auprès des personnes atteintes d’Alzheimer.

Cet article reflète les connaissances disponibles à sa date de rédaction. Compte tenu de l’évolution constante des connaissances scientifiques, certains éléments abordés pourraient ne plus être entièrement actuels ou complets au moment de votre consultation.


Sources :
Les solutions de répit pour les aidants – Mon Parcours Handicap 
Maladie d’Alzheimer – Suivi médical des aidants naturels – HAS
Tay, L. X., Ong, S. C., Ong, H. M., Teh, E. E., Ch’ng, A. S. H., Tiong, I. K., … & Parumasivam, T. (2025). Caregiver burden of Alzheimer’s disease among informal caregivers: a cross-sectional study in Malaysia. Scientific Reports, 15(1), 10067.
Aidants familiaux – CNSA
« Répit des aidants » – HAS
Besoin de répit : 17 fiches-repère pour les aidants – Ministère du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles

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