Dénutrition et cancer s’inscrivent dans un cercle vicieux où la maladie affaiblit l’organisme, le rendant plus vulnérable, et où la fragilité entrave la guérison. Cette spirale négative affecte non seulement l’efficacité des traitements, mais impacte également la qualité de vie des patients. Les effets de cette alliance cancer/dénutrition ne se limitent d’ailleurs pas au strict aspect physique, mais s’attaquent également au moral et à l’espoir de guérison. Comprendre ses mécanismes et proposer des solutions nutritionnelles adaptées est essentiel, afin de redonner aux patients les armes pour vaincre la maladie.

Dénutrition et cancer : Pourquoi la dénutrition est-elle fréquente chez les patients cancéreux ?

La dénutrition est un déficit en énergie, protéines ou autres nutriments, provoquant des changements mesurables dans les fonctions et la composition corporelle et aggravant le pronostic de la maladie. Lorsqu’elle est associée à une maladie inflammatoire chronique comme le cancer, on parle de cachexie.

Elle découle d’un cercle vicieux entre la maladie elle-même et ses traitements agressifs. Les effets secondaires comme les nausées, vomissements, douleurs ou obstructions digestives altèrent considérablement l’appétit et la capacité à s’alimenter convenablement. S’ajoutent parfois une sensation de satiété précoce et des troubles de la déglutition ou de la digestion.

Par ailleurs, certaines tumeurs augmentent les besoins énergétiques de l’organisme tout en détournant une partie des nutriments à leur profit. Le métabolisme est alors déréglé, accélérant la consommation des réserves, en particulier musculaires. La dénutrition s’installe, d’autant plus grave que la perte de poids est rapide et importante par rapport au poids antérieur.

Les troubles psychologiques comme la dépression ou l’anxiété, fréquents chez ces patients, viennent aussi réduire l’appétit et aggraver le phénomène.

Une perte pondérale de 5 % en 1 mois ou 10 % en 6 mois suffit à caractériser un état de dénutrition nécessitant une prise en charge nutritionnelle urgente.

LIRE AUSSI : Cancer et dénutrition : Le microbiote comme nouvelle voie vers une alimentation personnalisée

Quels sont les signes de dénutrition chez les personnes atteintes de cancer ?

Un amaigrissement rapide et important, une fonte musculaire marquée ainsi qu’une diminution visible de la masse grasse sont des signaux d’alerte.

L’état général se dégrade, avec une peau qui se fragilise, se desquame et se dessèche. Les phanères comme les cheveux, les ongles et les poils deviennent ternes, striés, cassants et clairsemés.

En cas de dénutrition sévère avec d’importantes carences en protéines, des œdèmes peuvent apparaître au niveau des membres inférieurs et du visage.

Le système immunitaire s’affaiblit alors, exposant à un risque accru d’infections opportunistes. D’autres complications peuvent survenir comme une augmentation du volume du foie (hépatomégalie).

Un dépistage régulier par pesée, examen clinique, recueil des apports alimentaires et éventuellement tests sanguins permet d’identifier rapidement tout signe préoccupant, afin d’initier une prise en charge nutritionnelle appropriée sans attendre une dénutrition sévère.

Quels sont les risques associés à la dénutrition pendant le traitement du cancer ?

La dénutrition est un enjeu majeur dans la prise en charge du cancer. Elle affaiblit considérablement le système immunitaire, rendant l’organisme plus vulnérable aux infections. La cicatrisation des plaies est également ralentie, augmentant les risques de complications post-opératoires.

Les patients dénutris ont souvent plus de mal à tolérer les traitements, ce qui peut entraîner des interruptions ou des modifications de la thérapie.

La fatigue chronique et la perte de masse musculaire, conséquences de la dénutrition, entravent quant à elles la qualité de vie et la capacité du patient à poursuivre ses activités quotidiennes. 

Au-delà de 15 % de perte de poids, le pronostic vital est engagé. Fait alarmant, entre 5 % et 25 % des décès liés au cancer sont attribués aux effets dévastateurs de la dénutrition plutôt qu’à la maladie elle-même. Prévenir et traiter la dénutrition est donc capital pour optimiser les chances de guérison et préserver une bonne qualité de vie durant les traitements anticancéreux.

Cancer et dénutrition : Quelles sont les stratégies pour lutter contre les carences ?

Le cancer et les traitements associés peuvent entraîner une dénutrition sévère, affaiblissant l’organisme et compromettant l’efficacité des thérapies. Pour lutter contre les carences nutritionnelles, une approche globale est indispensable.

Mesures diététiques

La première étape consiste à traiter les symptômes responsables de la dénutrition, comme les nausées, vomissements ou diarrhées, par des médicaments adaptés.

Ensuite, il est essentiel d’enrichir l’alimentation en calories et en protéines, en privilégiant des aliments à haute densité nutritionnelle. Sauf avis médical contraire, les régimes restrictifs doivent être évités.

Le fractionnement des repas tout au long de la journée, avec des collations, facilite leur prise. Stimuler l’appétit en retrouvant une certaine convivialité autour des repas, en cuisinant et en présentant des plats appétissants, est également bénéfique.

ÉCOUTEZ NOTRE REPLAY : Le microbiote et l’alimentation personnalisée pour les patients cancéreux

Suivi et prescriptions médicales

Lorsque l’alimentation est insuffisante, des compléments nutritionnels peuvent être prescrits. Dans les cas les plus sévères, une nutrition artificielle par sonde d’alimentation ou par perfusion est nécessaire.

La pratique d’une activité physique adaptée, sous surveillance médicale, est également recommandée pour augmenter la masse musculaire, diminuer les risques de rechute et atténuer certains effets secondaires liés aux traitements contre le cancer.

Un suivi régulier par une équipe médicale spécialisée est essentiel pour ajuster les apports nutritionnels aux besoins spécifiques du patient. L’amaigrissement et les changements corporels, affectant l’image de soi, peuvent également nécessiter un soutien psychologique.

Prise en charge diététique personnalisée

Un accompagnement diététique est primordial pour adapter au mieux le régime alimentaire en fonction de l’état de santé, des traitements en cours et des préférences alimentaires du patient. Des ajustements réguliers seront effectués pour optimiser la prise en charge nutritionnelle tout au long du parcours de soins.

Un diététicien qualifié peut aider à élaborer un plan alimentaire équilibré, riche en calories et en protéines. Il pourra également prodiguer des conseils pratiques pour faciliter la prise alimentaire et maximiser l’apport nutritionnel, en adaptant les textures, saveurs et modes de préparation des aliments.

La dénutrition, fréquente chez les patients cancéreux, fragilise leur état de santé et réduit leurs chances de guérison. Mieux la comprendre et la combattre est un enjeu majeur de santé publique, pour lequel la mobilisation de tous les acteurs est nécessaire.

Soutenez le projet Onco-Nutribiota !


Sources :

Cancer et dénutrition – Société Francophone Nutrition Clinique et Métabolisme

Dénutrition chez les patients atteints de cancer : un risque avéré sur le pronostic de la maladie – Institut National du Cancer

Pierre-Édouard Varin. Impact du statut nutritionnel sur le pronostic et la progression de la maladie chez le patient cancéreux. Sciences du Vivant [q-bio]. 2023. ffdumas-04515346f